Une semaine aura passé, entre la décision du club caladois de ne pas prolonger son bail une saison de plus à Villefranche et le besoin pour Hervé Della Maggiore de couper le son pendant quelques jours, afin de pouvoir mettre des mots sur deux saisons et demi qui ont marqué le FCVB.
À son bilan, il laissera deux barrages d'accessions pour la Ligue 2 et une 6ème place en National, la saison où il aura fallu batailler jusqu'au bout pour ne pas faire partie du train des relégués à la N2. Une forme d'exploit au regard des clubs en présence. Dernier entretien en Calade pour Della Maggiore qui rend hommage à son groupe de joueurs tout en regrettant le comportement de son ancien président Philippe Terrier, à son endroit.
Hervé Della Maggiore, que garderez-vous de ces deux années et demi passées à Villefranche?
"Le parcours sportif, forcément. J'ai eu des groupes de joueurs avec lesquels j'ai pris beaucoup de plaisir. Il y a eu très peu de conflits à gérer, si ce n'est aucun. C'est très agréable de travailler dans ces conditions, parce que dans le foot il y a souvent d'autres aspects à prendre en compte.
Là, ce qui était agréable, c'est que je n'ai fait que gérer du football. J'ai connu de bonnes personnes, compétentes, dans mon staff. J'ai fait de belles rencontres dans ce club : du public, des partenaires, des journalistes."
Cette période en Calade vous a-t-elle redonné foi au coaching après ce que vous aviez connu au Gazelec d'Ajaccio ?
"Forcément. Ce passage à Villefranche m'a redonné goût à entraîner. C'était centré sur le football alors que ma dernière expérience à Ajaccio, ce n'était pas vraiment le cas. Il y avait beaucoup de choses à régler en dehors du terrain, mon adjoint (Freddy Morel) gérait plus le foot et moi, l'humain. Ce n'était pas tout le temps agréable même si ça fait partie du métier.
La péripétie d'Ajaccio a été très difficile à vivre, après coup (en juin 2019, le club corse était descendu en National, après avoir perdu en barrages retour 0-2 contre Le Mans sur sa pelouse avec un but manceau inscrit à la 97e ! Alors qu'à l'aller le Gazelec l'avait emporté 1-2)". C'est pour ça que je remercie le FCVB, quoi qu'il en soit.
J'ai eu des joueurs exceptionnels. J'ai pu retrouver des joueurs que j'avais eu à Bourg et sur lesquels je ne m'étais pas trompé et qui n'ont pas changé dans leur comportement, leurs qualités. J'ai retrouvé la joie d'aller au travail avec des mecs, dans mon staff, qui étaient dans le bureau avec moi, puis sur le terrain"
Vous n'avez pas été prolongé à Villefranche par le président du club, Philippe Terrier, la semaine dernière. Après avoir obtenu le maintien à Sedan (0-3), vous vous attendiez à être reconduit ou vous pensiez que ce serait compliqué de poursuivre au FCVB une saison de plus ?
"J'étais assez mitigé par rapport au comportement du président depuis quelques temps avec moi. Un jour je me disais qu'il allait me reconduire et le lendemain, je le voyais différemment, je pensais alors que j'étais dans ma dernière saison ici."
Lors de votre entretien, avez-vous eu une proposition pour prolonger même si le club avait annoncé vouloir rencontrer d'autres postulants pour vous succéder ?
"Non, le président ne m'a fait aucune proposition. Cela faisait un moment que je le questionnais sur ça. Il y a un mois, un peu avant la fin du championnat, j'ai commencé à lui en parler. J'étais en fin de contrat, j'avais besoin de connaître ses intentions.
Je ne demandais pas nécessairement une réponse mais je voulais surtout voir comment on travaillerait la saison d'après, les perspectives envisagées. Parfois, je sentais que j'étais dans le projet et parfois moins. Il était plus dans les reproches sur mon attitude, mon recrutement."
Il vous a reproché un manque de communication dans votre groupe…
"Oui, le président me l'a reproché. Mais je n'ai pas réussi à avoir des détails. J'en ai parlé à mes joueurs. Il y a peut-être eu un ou deux joueurs qui sont allés le voir pour dire que je communiquais peu mais en général ce sont des joueurs qui ne jouent pas ou qui sont un peu moins bien à un moment de la saison et qui se cherchent des excuses, comme c'est souvent le cas.
Mais je n'ai pas l'impression que cela faisait l'unanimité. On m'a aussi dit que c'était la communication vis-à-vis de lui. Peut-être… Mais il se plaignait aussi de cela avec Alain Pochat. A un moment donné, ce n'est peut-être pas les entraîneurs qui posent problème.
Il m'a aussi reproché le recrutement. Je lui ai rappelé les saisons des attaquants Elisor (2021-2022, 17 buts en 34 matches) et Ba (2022-23,13 buts en 34 journées). Franchement, je pense qu'il se cherchait plus de prétextes pour que ça se finisse. Je ne lui en veux pas. J'accepte sa décision mais je ne la comprends pas.
Il y a 90% des gens qui ne la comprennent pas aujourd'hui. C'est sa décision. La semaine avant notre dernier match à Sedan quand il m'a dit qu'il allait voir trois coachs, cela a sonné le glas pour moi. J'ai joué le jeu contre Sedan mais j'ai trouvé le procédé très limite de sa part."
"Mon objectif est de revoir la Ligue 2"
Dans un tel contexte, comment avez-vous réussi à souder le groupe pour aller chercher le maintien ?
"En reprenant l'expression des joueurs, c'est-à-dire "partir le cul propre" ! Au retour de Sedan, c'est vraiment cette expression qui était dans les esprits, après notre dernière victoire synonyme de maintien. "Au moins on repartira le cul propre", voilà ce que j'ai entendu dans le car sur le chemin du retour.
J'ai trouvé cette expression assez juste. Quand tu fais du sport, tu fais toujours tout pour gagner, quoi qu'il en soit. Ne pas jouer le jeu jusqu'au bout, ce n'était pas dans la mentalité de ces gars. Et le club ne méritait pas ça. Il fallait se battre, jusqu'au bout. On était redevables de ce club. Il fallait le maintenir en National. "
Et cela a été bien fait avec une fin de parcours marquée par quatre succès d'affilée…
"Oui, ça été bien fait. Je le pense."
Rebondir pour vous, ça signifie quoi pour vous, aujourd'hui ? Une rumeur vous envoie à Bourg. Quelle est votre priorité ?
"Aujourd'hui, pour répondre à cette rumeur sur un éventuel retour à Bourg, on ne sait pas encore à quel niveau ils repartiront la saison prochaine (NDRL : les bressans, 14ème du National ont été relégués en N2 mais peuvent encore être repêchés). C'est un club qui m'a encore dans le cœur. La situation est difficile pour eux. Financièrement, je ne sais pas trop où ils en sont. Aujourd'hui, Bourg n'est pas la principale piste que j'ai devant moi."
Retrouver un poste en Ligue 2 fait-il partie de vos préoccupations ?
"Mon objectif est de revoir la Ligue 2. Et pourquoi pas ? Quand tu vois que des entraîneurs qui sont passés par le National comme Didier Santini qui était avant-dernier avec Saint-Brieuc et qui a rebondi à Rodez, je me dis que tout est possible.
J'ai quand même fait trois belles saisons à ce niveau à Bourg en obtenant le maintien avec le plus petit budget puis une année à Ajaccio. Sans manquer d'humilité, j'ai fait mes preuves pour accéder à ce niveau, même avec Villefranche, un autre petit budget, où on a atteint les barrages à deux reprises et fini 6ème cette saison. Ça peut interpeler certains clubs, aujourd'hui".
Propos recueillis par Ralph NEPLAZ