Dans la cour intérieure du domaine de la Grange Charton à Régnié-Durette, et même dans une parcelle de vignes à proximité des lieux, la flavescence dorée a été au cœur des échanges durant une demi-journée, mardi 18 juillet.
À l'initiative des deux ODG du Beaujolais, la Fredon, la chambre d'agriculture, Agribio et la cave coopérative Vinescence, cette rencontre technique, pour montrer concrètement les différents leviers contre la maladie qui frappe de plus en plus fortement le Beaujolais depuis plusieurs années, a attiré plus d'une centaine de vignerons.
En début d'après-midi, certains ont d'ailleurs été formés pour encadrer, en compagnie des agents de la Fredon Aura et, nouveauté, ceux de la chambre d'agriculture et de la Sicarex, les futurs groupes de prospection qui arpenteront le vignoble après les vendanges.
C'est à 17 h que ce rendez-vous technique a pris une tournure politique avec la présence du sous-préfet de Villefranche-sur-Saône, Jean-Jacques Boyer, "venu marquer tout le soutien de l'État à la profession pour s'attaquer à deux problèmes" : la flavescence dorée donc, mais aussi les friches viticoles, les deux étant intimement liés et "à être traités collectivement", a-t-il assuré.
La flavescence dorée progresse
Sur le premier sujet cité, comme l'a confirmé le représentant de l'État du Beaujolais, la flavescence dorée poursuit son expansion partout dans le vignoble. De 8 500 ceps contaminés en 2021, le Beaujolais en a dénombré 25 000 environ l'année 2022. En présence des élus du vignoble, le sous-préfet a rappelé les obligations et "non les possibilités", notamment celle de traiter les parcelles inclues dans les zones de lutte.
Les situations les plus critiques peuvent même déboucher par un arrachage de parcelle dans son intégralité. Jean-Pierre Rivière, président de l'ODG beaujolais – beaujolais-villages a informé que les ODG ont repris en main le recrutement pour les prospections, obligatoires elle aussi. "On a malheureusement quelques récalcitrants. Un système d'amende a été mis en place pour les prospections et nous avons besoin de l'appui des services de l'État pour que l'arrêté préfectoral rende ces amendes obligatoires", a-t-il indiqué. Jean-Marc Lafont (JML), président de l'ODG des crus, a souligné un problème d'équité "entre des viticulteurs qui jouent le jeu et à qui on impose des règles et des contraintes et ceux qui ne le font pas et qui abandonnent leur vigne, sans aucune pénalité. C'est un problème".
Les friches, des foyers de contamination
En lien avec la FD, les annonces se sont automatiquement tournées sur la problématique des friches viticoles, "que nous avons depuis un certain nombre d'années et que nous avons pris à bras le corps depuis deux ans maintenant de manière très sérieuse", a commenté JML. Tous les acteurs et le sous-préfet ont évoqué des risques incendie, sanitaires – "ce sont des foyers de contamination de la FD et d'autres maladies", dixit JML – une atteinte portée aux paysages du Beaujolais et "des terres qui pourraient être remises en culture au profit de jeunes installés".
Sur ce volet, les services de l'État (Draaf, DDT, etc.) vont passer à la vitesse supérieure. Des courriers seront transmis aux propriétaires pour arracher les friches, à leur frais, à l'aide d'un prestataire. La filière peut aussi compter sur l'aide de deux communautés de communes (Saône Beaujolais et Pierres dorées) avec la création de répertoires pour identifier les parcelles en friches, et celui de la Safer "pour créer des ponts et des liens entre les propriétaires parfois difficiles à identifier et des potentiels repreneurs" selon JML.
"Faire des cas d'école" pour les friches
L'ensemble de ces annonces, dans une certaine forme d'unité et de mobilisation collective, ont relativement satisfait les représentants de la filière qui en attendaient plus de cette action qu'ils apparentaient à une opération de communication. "Effectivement, on a besoin du soutien de l'État. Mais peut-être que pour aller plus loin et qu'on fasse appliquer ces obligations, il faut faire des cas d'école, à travers des arrachages médiatisés et soutenus par l'État", a lancé le président de l'ODG des crus. "On vous attend dans l'action, qu'elle soit rapide car la maladie n'attend pas", a soutenu Didier Condemine, vigneron à Cercié et président du syndicat viticole local.
Selon nos informations, quatre réunions se sont tenues ces derniers mois avec l'ensemble des acteurs viticoles et de l'État et ses services pour établir un protocole d'accord et ainsi mettre dans la boucle les ordonnateurs comme les maires. "Nous sommes conscients que c'estune procédure longue", confie un des acteurs de la filière viticole qui, comme ses homologues, n'a pas masqué sa déception, mardi 18 juillet, qui aurait préféré assister à une opération concrète sur une friche viticole afin de marquer les esprits. "C'est un peu ce qui était prévu au début…".