Ce n'est pas moi, c'est lui. Lundi dernier, dans la salle d'audience principale du tribunal de Villefranche, ils étaient deux à comparaître pour des faits similaires : détention, offre ou cession, acquisition et usage illicite de stupéfiants, dont l'un en état de récidive légale. Une affaire qui remonte au 18 mai 2020.
À l'époque, un homme de 59 ans subissait une perquisition à son domicile pour des faits d'escroquerie et de dénonciation calomnieuse. Sur place, les forces de l'ordre découvrent quinze pieds d'herbe, dix-huit grammes de résine de cannabis et onze grammes d'herbe de cannabis.
Du matériel est également retrouvé tel que des lampes ultra-violet, des sachets de conditionnement, une balance de précision et un carnet dans lequel des noms et des sommes en euros ont été notés.
Auditionné, l'homme explique avoir acheté des graines de cannabis avec une autre personne, le second prévenu. Âgé de 30 ans au moment des faits, il était hébergé par le premier parce qu'il était "en galère", sachant qu'ils se connaissent depuis 2010 et qu'il avait été hébergé une première fois en 2012.
Le quinquagénaire, en béquilles lors du procès en raison d'un accident de travail datant de 2015, a assumé consommer la production de cinq des plants sous la forme de tisanes pour soulager ses douleurs. Mais selon lui, le matériel et les dix autres plants appartenaient à l'autre homme qui avait quitté le domicile une semaine avant la perquisition en laissant tout cela derrière lui. Ce dernier, en revanche, conteste et assure que son hôte "se servait" de lui pour vendre sa production en le faisant passer pour son dealer afin de traiter avec des clients.
Il dit ne pas s'y connaître, mais se trahit
"Il m'est arrivé une fois de faire "une passe", a reconnu le trentenaire. Mais c'était pour une connaissance de monsieur (NDLR : le quinquagénaire) afin qu'il me laisse tranquille." Il assure que les pieds de cannabis existaient déjà avant son arrivée dans le logement fin 2019 et que l'écriture sur le carnet ne correspond pas à la sienne, suite à une question de son propre avocat.
De son côté, la procureure de la République, Tania Deshaires, a demandé à l'hébergeur de préciser la date d'arrivée dans le logement de l'hébergé pour établir la date de début de culture du cannabis. Ce à quoi le quinquagénaire a répondu qu'il fallait "90 jours pour que ça pousse". "Vous avez l'air de vous y connaître, je le note", a-t-elle répondu face à cet aveu involontaire.
La représentante du ministère public a demandé à élargir la période de prévention au 1er décembre 2019 en se basant sur les déclarations des deux prévenus, au prétexte que la seule date de la perquisition du 18 mai 2020 ne permettait pas de caractériser les faits.
Elle a réclamé pour le trentenaire une peine de quatre mois de prison avec un sursis simple et un stage de sensibilisation sur les dangers de la consommation de drogue. Concernant le quinquagénaire, elle a requis 120 jours amende à 10 € et un stage sur les stupéfiants à accomplir à ses frais. Les avocats ont chacun tenté une approche différente.
Pour le plus âgé des deux, Maître Leblanc-Mortagne a utilisé le fait qu'à aucun moment l'enquête n'avait clairement établi qu'il s'agissait de cannabis via des tests scientifiques pour réclamer une relaxe de son client. Maître Camille Lallich, qui représentait le trentenaire, a demandé à ce que l'état de récidive légale – il avait été condamné en octobre 2020 – ne soit pas retenu en raison de la possible réévaluation de la période de prévention et donc de redescendre la peine à deux mois avec sursis.
Le tribunal a choisi de relaxer les deux hommes sur les chefs d'accusation d'acquisition et de détention. L'hôte a écopé de 120 jours amende pour l'usage illicite. L'hébergé, lui, a été condamné à trois mois avec sursis, l'état de récidive légale ayant quand même été retenu.